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Le contrôle des participations sociétaires où la martingale du pouvoir réglementaire.

Alexandre Guillois

Aucune disposition de l’article L. 331-2 I du Code rural ne soumet à autorisation préalable la prise de participation dans une exploitation agricole.


En effet, par une décision en date du 9 octobre 2014, le Conseil constitutionnel a déclaré inconstitutionnelles les dispositions de la loi d'avenir du 13 octobre 2014 en ce qui concerne le 2° de l'article L. 331-1-1 du code rural et de la pêche maritime au motif qu'elle ne réservait pas la qualification d'agrandissement aux opérations sociétaires conduisant à une participation significative dans une autre exploitation agricole.



« 37. Considérant toutefois, que les dispositions du 2° de l'article L. 331-1-1 du code rural et de la pêche maritime qualifient d'agrandissement d'exploitation agricole toute prise de participation, quelle que soit son importance ; qu'en ne réservant pas cette qualification aux prises de participation conduisant à une participation significative dans une autre exploitation agricole, ces dispositions ont porté au droit de propriété et à la liberté d'entreprendre une atteinte disproportionnée au regard de l'objectif poursuivi ; que, par suite, dans ce 2°, les mots : « ou de prendre, directement ou indirectement, participation dans une autre exploitation agricole » doivent être déclarés contraires à la Constitution ; »


Ces dispositions ont donc été censurées.


Depuis, il n’y a eu aucune intervention législative pour reprendre ces dispositions et instaurer un contrôle des prises de participation.


Dans ces conditions, aucune disposition ne permet donc d’apprécier la prise de participation significative pouvant être qualifiée d’agrandissement d’exploitation agricole soumis au contrôle des structures.



Pour autant, le décret n°2015-713 du 22 juin 2015 semble vouloir faire passer en force et par la petite porte réglementaire ce contrôle jugé inconstitutionnel.


Aux termes des dispositions de l’article R.311-1 du Code rural telles que tirées de ce décret,


« Pour l'application des dispositions du 1° de l'article L. 331-1-1, une personne associée d'une société à objet agricole est regardée comme mettant en valeur les unités de production de cette société si elle participe aux travaux de façon effective et permanente, selon les usages de la région et en fonction de l'importance de ces unités de production. »


On comprend ici que le pouvoir réglementaire restaure l'assise textuelle nécessaire à l'encadrement des participations sociétaires en définissant le statut d’associé d’une société agricole et en interprétant de façon exégétique la jurisprudence du Conseil constitutionnel pour conditionner les prises de participation significatives derrière une définition de l’associé exploitant agricole.


En tous les cas, c’est l’interprétation qui en a été faite par certains services de la DREAL chargé d’instruire les demandes au titre du contrôle des structures.



Article R 331-1


Pour l'application des dispositions du 1° de l'article L. 331-1-1, une personne associée d'une société à objet agricole est regardée comme mettant en valeur les unités de production de cette société si elle participe aux travaux de façon effective et permanente, selon les usages de la région et en fonction de l'importance de ces unités de productions.



EXEMPLES


Exemple 1 : Exploitant individuel mettant en valeur 50 ha. Demande à entrer en tant qu'associé exploitant dans EARL exploitant 50 ha (sans mettre son exploitation individuelle à disposition de l'EARL) : Surface totale de l'ensemble de ses unités de production : 50 + 50 = 100 ha



C’est donc la martingale du pouvoir réglementaire, pour augmenter ses chances de pouvoir contrôler les participations sociétaires, il édicte tout simplement les conditions de ce contrôle sans fondement législatif.


Il ne semble toutefois pas que le pouvoir réglementaire, ce faisant, ait excédé sa compétence, dans la mesure où la réglementation de l'accès à l'activité agricole n'est pas du domaine réservé de la loi (article 34 de la Constitution).



Cependant, on peut s’insurger sur la méthode utilisée pour rétablir ce contrôle. En effet, l’article R.311-1 du Code rural qui devait préciser la notion d’exploitation agricole n’était pas destiné à recevoir acte du contrôle des prises de participation. Le texte réglementaire a donc outrepassé son cadre législatif, mais cela ne permet pas d’en tirer la conséquence de son illégalité dans la mesure où il convient d’apprécier que le pouvoir normatif réglementaire n’était pas limité par la loi.



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