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  • Alexandre Guillois

Le Conseil d'Etat refond la clé des champs pour les PLU?

Par un arrêt en date du 4 mars 2016, le Conseil d’Etat retient une interprétation stricte et étrécie de la définition du zonage agricole pour les plans locaux d’urbanisme contenu dans l’article R.151-22 du code de l’urbanisme.


En effet, aux termes des dispositions de l’article R.151-22 du code de l’urbanisme, « les zones agricoles sont dites "zones A". Peuvent être classés en zone agricole les secteurs de la commune, équipés ou non, à protéger en raison du potentiel agronomique, biologique ou économique des terres agricoles. »


Les zones A sont des zones où seule l'agriculture est autorisée. Toutefois cette activité n'est pas prohibée dans les zones naturelles et forestières dites N, qui peuvent en particulier concerner des secteurs mixtes, dans lesquels coexistent l'agriculture et d'autres utilisations des sols.


Jusqu’alors, la jurisprudence était plutôt complaisante sur la classification en zone A. Il faut dire qu’à l’occasion d’un recours contre un Plan local d’urbanisme, en ce qui concerne sa légalité interne, les juges ne contrôlent que l’erreur manifeste d’appréciation, soit une erreur grossière détectable par un non initié (CE, 30 décembre 1998, n° 158873, Cne Saint-Jean-de-Sixt).


Aussi, les juges girondins ont pu laisser passer le classement d’un terrain en zone agricole alors qu’il ne faisait pas l’objet d’une exploitation agricole et qu’il n’avait aucune valeur agricole, sans y voir une erreur manifeste d’appréciation (CAA Bordeaux, 30 décembre 2005, n°02BX02119). Les juges avaient considéré que la motivation retenue par la Commune d’Aslonnes, le fait que le terrain soit situé dans un secteur à dominante rurale et à caractère agricole, pouvait s’intégrer dans la définition posée par l’ancien article R.123-7 du code de l’urbanisme.


Cette interprétation du zonage agricole ne souffrait donc d'aucune objection jusqu'à ce que la haute cour en soit saisie. Dans notre affaire, le pourvoi en cassation est formé contre un arrêt du juge d’appel de Marseille pour des faits similaires, la contestation du classement en zone A du PLU de deux parcelles. L'interprétation des textes par le Conseil d'Etat est pragmatique et littérale, une Commune (ou une intercommunalité dans le cadre d'un PLU intercommunal depuis la loi ALUR du 24 mars 2014) entache d'une erreur manifeste d'appréciation le classement en zone agricole d'une parcelle sans établir son potentiel particulier pour un tel usage, c’est-à-dire son potentiel agronomique.


La portée de cet arrêt est peut-être à relativiser par les faits de l’espèce. Le considérant de principe ajusté par le Conseil d’Etat est circonstancié par l’existence d’une construction sur une des parcelles en litige.


En effet, on relèvera que le Conseil d’Etat, tout en énonçant des indices précieux sur la reconnaissance d’un potentiel agronomique, ne pose pas une définition précise de cette notion.



Il faut également replacer le zonage agricole issu des PLU avec les zones agricoles protégées (ZAP) délimitées par arrêté préfectoral. Le sens de superposition de ces zonages place les zones A du PLU comme un appoint aux « zones agricoles dont la préservation présente un intérêt général en raison soit de la qualité de leur production, soit de leur situation géographique, soit de leur qualité agronomique » qui au sens de l’article L 112-2 du Code rural peuvent déjà faire l’objet d’une ZAP. Les ZAP constituent des servitudes d'utilité publique annexées au PLU.


La référence au potentiel agronomique d’une parcelle pour les zones A doit pouvoir s’inspirer des raisons inventoriées pour les ZAP à savoir la qualité des sols, sa fertilité, son rendement ou sa situation géographique.


D’ailleurs, le Conseil d’Etat ne remet pas en cause ces critères alternatifs et certainement non exhaustifs, sur les deux parcelles en litige, seule celle située à l’intérieur d’une partie urbanisée de la commune a été mal classée. De fait, la jurisprudence girondine n’est peut-être pas désuète.


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