La reconstruction même à l’identique d’un ouvrage situé sur le DPM, sans autorisation d’occuper ce DPM, constitue une contravention de grande voirie :
« Considérant, en deuxième lieu, qu'à supposer même que le mur et le remblai antérieurement existants aient été reconstruits à l'identique, il est constant que la SOCIETE "LE GRAND HOTEL DES BAINS" ne disposait pas auparavant pour ces ouvrages d'une autorisation d'occupation privative du domaine public maritime et que les travaux réalisés n'ont pas fait l'objet d'une telle autorisation ; qu'il suit de là que leur réalisation entraîne une occupation sans titre du domaine public et constitue la contravention de grande voirie susmentionnée, qui justifie la condamnation de ladite société à démolir l'ouvrage reconstruit, sans que puissent être utilement invoquées les circonstances que cette démolition aurait des conséquences disproportionnées au motif qu'elle supprimerait une protection du parc arboré de l'établissement contre l'action des flots et menacerait ainsi l'équilibre économique de l'exploitation hôtelière ; »
Il n’est même pas possible de se prévaloir des dispositions de l’article L111-15 du Code de l’urbanisme selon lequel :
« Lorsqu'un bâtiment régulièrement édifié vient à être détruit ou démoli, sa reconstruction à l'identique est autorisée dans un délai de dix ans nonobstant toute disposition d'urbanisme contraire, sauf si la carte communale, le plan local d'urbanisme ou le plan de prévention des risques naturels prévisibles en dispose autrement. »
« Considérant, en troisième lieu, que Mme ORLANDINI ne peut utilement se prévaloir des dispositions de l'article L. 111-3 du code de l'urbanisme relatives à la délivrance d'autorisation de construire en cas de reconstruction à l'identique, dès lors qu'une telle autorisation d'urbanisme ne vaut pas autorisation du concédant au sens des stipulations du 3ème alinéa de l'article 5 du sous-traité susmentionné ; »
De même, la circonstance que l’ouvrage était implanté avant la loi n°63-1178 du 28 novembre 1963 relative au domaine public maritime qui a incorporé le DPM naturel est sans incidence sur le caractère illégal de cette occupation.
« Considérant qu'aux termes de l'article 1er de la loi susvisée du 28 novembre 1963, relative au domaine public maritime : "Sont incorporés, sous réserve des droits des tiers, au domaine public maritime : ... b) les lais et relais futurs de mer, et, sous réserve des dispositions contraires d'actes de concession, les terrains qui seront artificiellement soustraits à l'action du flot " ; que Mme ARROYO soutient que le terrain en cause appartiendrait au domaine public artificiel départemental ; que, toutefois, le chemin de grande communication n° 38, réalisé par le département de l'Hérault, a été classé dans le réseau national par décret du 4 décembre 1930 ; qu'à supposer que le terrain d'assiette du bâtiment en litige se situerait sur un exondement antérieur à 1963, il est constant que celui-ci n'a pas été le résultat d'une concession d'endigage régulièrement accordée, seule de nature à faire sortir le bien du domaine public maritime ; que si Mme ARROYO fait valoir que ce terrain d'assiette se situerait sur un cordon dunaire naturellement exondé, il résulte de l'instruction que celui-ci était atteint de manière habituelle par les flots et que seuls les travaux d'enrochements, exécutés en 1983 dans le cadre d'une concession de plage, ont eu pour effet de soustraire définitivement la parcelle concernée à l'action des flots ; que celle-ci doit, dès lors, être regardée comme un relais de la mer qui, ayant été formé postérieurement à l'entrée en vigueur de la loi du 28 novembre 1963, a le caractère d'un "relais futur" au sens de l'article 1er précité de cette loi ; qu'en conséquence, Mme ARROYO n'est pas fondée à soutenir que la partie de la plage sur laquelle est implanté son établissement n'appartiendrait pas au domaine public maritime ; que la parcelle en cause n'ayant pas été, comme il vient d'être dit, exondée naturellement, Mme Arroyo ne peut valablement prétendre que celle-ci ferait partie d'un domaine public autre que maritime ; qu'en conséquence, le préfet pouvait régulièrement fonder les poursuites engagées contre l'intéressée sur les dispositions de l'ordonnance susvisée ; qu'en outre, la seule existence d'une construction sans titre sur le domaine public maritime suffit à établir la matérialité des faits, sans que celle-ci ne soit de plus subordonnée, contrairement à ce que soutient la requérante, à la condition que cette construction fasse obstacle à la navigation ; que, par suite, Mme Arroyo n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que les premiers juges, qui n'ont pas commis une d'erreur de droit dans la dévolution de la charge de la preuve de l'appartenance de la parcelle en cause au domaine public maritime, ont estimé que celle-ci appartenait au dit domaine public ; »
Pire, le propriétaire privé qui a engagé les travaux de reconstruction conserve la garde des ouvrages et s’expose à être poursuivi pour contravention de grande voirie.
« 8. Considérant qu'il résulte également de l'instruction que la piscine de la villa appartenant à la SCI Villakulla est implantée sur la parcelle cadastrée section AI n° 38, et donc sur le domaine public maritime ; que les autres ouvrages sont installés au droit de cette parcelle qu'ils soutiennent ou relient à la mer, et ne sont utilisés que par la SCI Villakulla ; que si celle-ci n'a pas construit ces installations, elle a en tout état de cause effectué des travaux de mise en sécurité ; que, dans ces conditions, la SCI Villakulla doit être regardée comme ayant la garde des ouvrages faisant l'objet du procès-verbal du 21 décembre 2010 et pouvait par suite, en l'absence de tout titre l'autorisant à occuper le domaine public maritime, être poursuivie pour contravention de grande voirie ; »
Bien que le juge judiciaire ne puisse pas lui-même constater une contravention de grande voirie, ce moyen tiré de l’appartenance au DPM de l’ouvrage litigieux est opérant devant le juge judiciaire pour exclure la garantie de l’assureur.
Dans une affaire récente, la Cour d'appel de Bordeaux a considéré qu’il s’agissait d’une difficulté sérieuse propre à exclure la garantie de l’assureur.
« Compte tenu de la difficulté soulevée par la compagnie Allianz sur la détermination de la propriété publique ou privée du terrain d'assiette du perré édifié par le syndicat des copropriétaires, qui relevait selon elle du domaine public maritime de par sa situation et par le jeu d'une présomption de domanialité publique qu'il appartenait à l'assuré de faire tomber en justifiant d'une procédure de déclassement , le juge de la mise en état avait dans sa décision du 19 septembre 2013 ordonné la production par le syndicat des copropriétaires de différentes pièces destinées à justifier de l'appartenance de ce terrain et à déterminer les limites exactes entre le domaine public maritime et le domaine privé.
Force est de constater que ces pièces n'ont pas été produites.
Il résulte des données du rapport d'expertise judiciaire que le perré a été réalisé en 1976 pour renforcer un ancien ouvrage en bois vieillissant, puis en 1981 par la mise en place d'un enrochement pour remplacer ce dernier, et en 2004 par la mise en œuvre d'une seconde couche d'enrochement pour renforcer la première ; que ces différents travaux de renforcement ont été effectués du côté de la mer.
En l'absence de document de délimitation précis entre le domaine public maritime et le domaine privé de la copropriété, il existe une difficulté tenant au caractère licite des travaux réalisés par celle-ci.
Par ailleurs la compagnie Allianz fait valoir que le perré n'est pas compris dans le périmètre des garanties , qu'en effet l'objet de la garantie est de garantir la pérennité de ' constructions immobilières ' et non des terrains, et qu'un ouvrage de défense à la mer n'est pas un mur de soutènement, que de surcroît en l'espèce le perré n'est pas en réalité une construction immobilière au sens de l'article 12-1 du contrat souscrit auprès d'elle , puisqu'il n'est ni fondé ni maçonné , et qu'il s'agit seulement d'un enrochement.
L'article 12-1 susvisé définit les biens assurés comme étant : ' Le bâtiment, c'est à dire les constructions immobilières avec toutes leurs annexes, et dépendances, y compris le cas échéant les piscines, tennis, les murs y compris de soutènement, les clôtures, les parkings, les plantations ainsi que les aménagements et installations considérées ou non comme immeubles par nature ou destination. (. ) '
Eu égard à cette définition et à la spécificité du perré en cause la discussion instaurée par l'assureur quant à l'application de sa garantie en l'espèce n'est pas dépourvue de caractère sérieux.
La proposition d'indemnisation faite dans un cadre transactionnel par la société Allianz, sous toutes réserves et avant application des garanties, afin d'éviter une instance judiciaire, ne peut être considérée comme une reconnaissance non équivoque, même partielle, de son obligation de garantie.
Le contenu de la lettre du 23 octobre 2009 visant le règlement d'une indemnité immédiate de 15 925 euros dans le cadre d'un sinistre tempêtes ouragan grêle neige du 24 janvier 2009 ne permet pas de vérifier si les dommages indemnisés affectent le mur perré en cause dans le présent litige, et ne peut avoir pour effet de rendre incontestable l'obligation sur laquelle est fondée la demande d'indemnité provisionnelle formée à l'encontre de l'assureur.
Les difficultés relatives d'une part à la licéité des travaux effectués par le syndicat des copropriétaires, d'autre part à la détermination du périmètre des garanties invoquées par la société Allianz sont suffisamment sérieuses pour que leur examen soit soumis à l'appréciation du juge du fond.
Il convient en conséquence de confirmer l'ordonnance en ce qu'elle a rejeté la demande de provision d'un montant de 216 741 euros. »
CA Bordeaux, 19-05-2016, n° 14/06477
La collectivité publique gestionnaire du domaine public concernée n’a aucune obligation de reconstruire les immeubles détruit même si cela résulte d’un cas de force majeur.
Aussi, l’autorisation d’occupation du DPM ne se présume pas et doit ressortir d’un acte express.
« Considérant, en second lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que M. Tassy a, en 1990, interrogé le service maritime sur la possibilité d'édifier les ouvrages en question ; que, par deux courriers en date des 8 octobre et 8 novembre 1990, ce service lui a indiqué, d'une part, qu'à supposer que la limite de propriété par rapport au rivage de la mer soit exacte, il lui était demandé de ne pas entreprendre de travaux au-delà de la clôture existante et, d'autre part, qu'en l'absence de délimitation du domaine public maritime, l'administration considérait comme applicable la limite cadastrale ; que les requérants, qui soutiennent avoir implanté le mur de clôture en litige sur l'emplacement de la clôture existante et sur la limite cadastrale, font valoir qu'ils ont été autorisés par l'administration à édifier les ouvrages litigieux ; que, toutefois, il ne ressort pas des pièces du dossier, alors que les appelants n'ont pas produit les courriers par lesquels M. Tassy a saisi l'administration, que ce dernier aurait sollicité une autorisation d'occupation du domaine public ; qu'en outre, les correspondances adressées par l'administration en date des 8 octobre et 8 novembre 1990, dont se prévalent les requérants, constituent de simples renseignements administratifs et ne peuvent, compte tenu de leurs termes, être regardés comme des autorisations d'occupation du domaine public ; »
La procédure de régularisation des exondements, l’autorisation idoine :
Aux termes des dispositions de l’article L. 3211-10 du CGPPP,
« Les exondements réalisés avant le 3 janvier 1986, hors d'une concession régulièrement accordée, peuvent faire l'objet en tout ou partie d'une concession ayant pour effet de transférer légalement à son bénéficiaire la propriété des terrains définitivement sortis des eaux. »
La demande de concession portant sur les exondements prévus à l'article L. 3211-10 fait l'objet d'une instruction administrative et, le cas échéant, d'une enquête publique (R3211-19 CGPPP).
Elle est adressée au chef du service gestionnaire du domaine public maritime (R3211-20 CGPPP). Elle est accompagnée d'un dossier établi aux frais du demandeur et comportant :
1° La description des terrains qui font l'objet de la demande et des travaux envisagés ;
2° Les plans vérifiés et approuvés par le service gestionnaire du domaine public maritime ;
3° S'il y a lieu, l'étude d'impact ou la notice d'impact prévue par les dispositions des articles R. 122-1 à R. 122-16 du code de l'environnement.
L’acceptation de cette demande est discrétionnaire.
3. Considérant d'une part, en ce qui concerne le refus d'autorisation d'occupation du domaine public maritime, qu'il ressort des pièces du dossier que la délimitation du domaine public maritime au droit de la villa " Mon Roc " sur laquelle s'est fondée l'administration a été effectuée par le décret du Président de la République française du 11 octobre 1912, pris en application du décret-loi du 21 février 1852 susvisé, et au visa des plans annexés au procès-verbal des opérations de la commission de délimitation du 21 décembre 1909, lesquels, produits devant le tribunal, sont tout à fait lisibles ; qu'il n'est pas établi, contrairement à ce qu'affirme la SARL Lymaro Limited, que cette délimitation effectuée par un acte régulièrement publié serait devenue " obsolète " du fait d'un phénomène d'érosion naturelle ; que, dès lors, la requérante n'est pas fondée à soutenir, en tout état de cause, que le refus d'autorisation d'occupation du domaine public maritime qui lui a été opposé serait illégal du fait de l'absence de délimitation dudit domaine au droit de sa propriété ;