La LOLF du 30 décembre 2009 a transféré le produit de la TASCOM aux collectivités:
L’ambitieuse réforme de la fiscalité locale par la loi du 30 décembre 2009 de finances pour 2010, n°2009-1673 laisse un reliquat d’indus payés par les collectivités territoriales à fiscalité propre dans les modalités de répartition de la dotation de compensation fixés par des circulaires inconstitutionnelles entre 2012 et 2014.
Rappelons qu’à l’occasion de cette réforme, les collectivités se sont vues priver des recettes de la taxe professionnelle. Afin d’assurer une compensation de ressources aux collectivités, le législateur a décidé transférer le produit de la taxe sur les surfaces commerciales (TASCOM) au niveau local, au profit soit des communes soit des EPCI, aux termes des dispositions de l’article 77 de cette loi.
Aussi, pour que ce transfert de ressources soit indolore pour l’Etat, le législateur y avait inclus une disposition instaurant un prélèvement d’un montant égal à celui perçu par ses services en 2010. En effet, au point 1.2.4.2 de cet article, on pouvait lire que la dotation de compensation des collectivités était diminuée en 2011 d’un montant égal au produit de la taxe sur les surfaces commerciales perçu par l’Etat en 2010 sur le territoire de la collectivité.
Des circulaires prises entre 2012 et 2014 ont illégalement soustrait le produit de la TASCOM de 2010 des dotations en compensation:
Le pouvoir réglementaire en a déduit dans ses circulaires prescrivant les modalités de répartition de la dotation de compensation entre 2012 et 2014 que cette dotation devait systématiquement être minorée de cette somme.
Savait-il seulement que le principe de libre administration des collectivités territoriales implique que seule la loi peut diminuer les ressources des collectivités territoriales ?
En tous les cas, le Conseil d’Etat le lui a appris à ses dépens puisque par un arrêt du 16 juillet 2014, n°369736 il a annulé ces déductions dans la circulaire du 5 avril 2013.
Si dans le carcan de l’excès de pouvoir, le Conseil d’Etat a seulement pu déclarer illégale celles contenues dans la circulaire du 5 avril 2013 relative aux Etablissement Publics de Coopération Intercommunale, il n’en pensera pas moins des dispositions similaires contenues dans les autres circulaires s’il doit en apprécier par exception la légalité dans un recours indemnitaire.
La LOLF du 29 décombre 2014 n'a pas régularisé rétroactivement les prélèvements indus:
Bien entendu, le législateur a été alerté sur cette décision. Curieusement, la correction qu’il a apportée dans la loi n°2014-1654 du 29 décembre 2014 de finances pour 2015 parait ne pas priver les collectivités territoriales d’un recours indemnitaire.
En effet, il s’est contenté de supprimer les mots "en 2011" des dispositions de la loi du 30 décembre 2009 désormais codifiées à l’article L. 2334-7 du Code général des collectivités territoriales.
Or, par principe la loi ne dispose que pour l’avenir. Dans ces conditions, le caractère rétroactif d’une loi ne peut résulter que d’une prescription formelle du législateur, ce qui n’est pas le cas pour ce texte.
S’il s’agit d’une coquille législative, elle peut coûter très cher à l’Etat, 750 millions d’euros si l’on en croit l’estimation du bureau d’études Cap Hornier publiée dans la gazette des communes.
L’illégalité des décisions de prélèvement du montant de la TASCOM au titre des années 2012, 2013 et 2014 n’a donc pas été rétroactivement effacée.
Il reste loisible au législateur d’exprimer expressément son intention de régulariser a posteriori et rétroactivement cette situation par la force de ses lois. A l’heure actuelle, une brèche est toujours ouverte et les collectivités territoriales ont ainsi les moyens de récupérer les sommes correspondant au montant de la TASCOM de 2010 illégalement prélevées à trois reprises par l’Etat, et cela devant le Tribunal administratif.
La communauté d’agglomération Var-Esterel Méditerranée a été la première à tenter sa chance pour répéter son indu. Seulement, au regard de la complexité des faits, son recours en référé pour sa demande de provision en recouvrement de cette créance contre l’Etat présentait des difficultés sérieuses pour le Président de la Cour administrative d’appel de Marseille.
Au regard de cette jurisprudence, mieux vaut donc privilégier un recours de plein contentieux indemnitaire au fond.
A ce stade, le temps joue en la faveur de l’Etat puisqu’à la fin de cette année, les créances des collectivités sur la TASCOM prélevée illégalement en 2012 seront déjà irrécupérables par l’effet de la prescription quadriennale applicable.